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Pourquoi les familles pêchent ensemble

de Oishi, Takanori

Lorsque la saison sèche approche, on peut entendre le son des haches en cours d’utilisation alors que les habitants façonnent çà et là des pirogues dans le village. Ils se préparent à aller pêcher pour la saison sèche. La saison des pluies dans les forêts tropicales humides est longue, froide et morne. Dès qu’il pleut, les habitants entrent dans la forêt moins fréquemment par peur de la chute d’arbres. La viande et le poisson se font rares durant cette saison, et les repas perdent en qualité. Lorsque cette période de vache maigre se rapproche de son terme, une agitation croissante anime les Bakwele qui habitent les villages bordant le fleuve Dja, qui coule entre les frontières du sud-est du Cameroun et de la République du Congo. Chaque année, les pères des villages – qui aiment pêcher et passer du temps avec leur famille – entrent en rivalité lorsqu’il s’agit de reconstruire leur bateau (Photo1).

http://jambo.africa.kyoto-u.ac.jp/cgi-bin/CameroonFS_en/wiki.cgi?action=ATTACH&page=Why+the+Family+Fishes+Together&file=Making+a+dugout%2EJPG
Photo1 : La fabrication d’une pirogue

Les Bakwele vivent le long de la rivière Dja (aussi appelé rivière Ngoko - un affluent du fleuve Congo) qui s’étale sur les frontières du sud-est du Cameroun et de la République du Congo et le long de la rivière Ivindo (un affluent du fleuve Ogooué) qui parcourt les frontières du Gabon et de la République du Congo. Ils pratiquent la culture sur brûlis, mais ils sont aussi reconnus pour leurs talents de pêcheurs en eau douce. C’est une des raisons qui expliquent pourquoi ils passent plusieurs semaines voire un mois entier à confectionner de grandes pirogues et s’en aller pour de longues pêches. Les bateaux transportent de nombreux passagers : tous les membres du foyer – y compris les nouveau-nés et les femmes enceintes –et parfois des poulets et des chèvres ; ils transportent également de nombreux produits agricoles comme des bananes plantains et de la farine de manioc et des équipements de la maison comme des pots, des poêles et de la literie (Photo2). Une particularité de la pêche des Bakwele est qu’ils impliquent toute la famille dans cette activité, parfois en partant pendant plus de deux mois.

http://jambo.africa.kyoto-u.ac.jp/cgi-bin/CameroonFS_en/wiki.cgi?action=ATTACH&page=Why+the+Family+Fishes+Together&file=Paddle+up+the+river%2EJPG
Photo2 : La traversée en pirogue

Les pêcheurs de la région des Grands Lacs de l’Est Africain et des savanes de l’Ouest Africain sont des pêcheurs africains réputés. Toutefois, une culture de la pêche existe aussi dans les zones de forêts tropicales humides, qui met habilement à contribution l’écologie des forêts et des rivières et est profondément ancrée dans la vie de la population. La particularité des activités des habitants de la forêt est la diversité des méthodes de pêches (25 rien que pour les Bakwele du Cameroun) pour attraper une grande variété de poisson (plus de 160 espèces rien que dans le fleuve Dja) et d’animaux aquatiques. Nombreux sont les participants à la pêche, et, en plus des pratiques de pêches des hommes adultes dans le courant des fleuves ou des rivières, il existe des pratiques pour lesquelles les femmes et les enfants excellent, comme la pêche à l’écope : en formant un petit barrage humain dans de petits ruisseaux qui coulent dans les zones forestières et en drainant des étangs de la forêt, ils peuvent attraper les poissons égarés (Photo3).

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Photo3 : l’auteur s’initiant à la pêche à l’écope

Cerise sur le gâteau, la dégustation des poissons qui ne sont trouvables lors de la saison sèche constitue le meilleur moment des camps de pêche. Les poissons non-consommés sont fumés et rapportés au village pour être distribués à des membres de la famille et à des amis, ou pour être échangés contre de l’argent en ville. Ainsi, plus les membres de la famille et les amis se joignent à « l’équipage » de la pirogue, plus les poissons sont consommés et donc moindre sont ceux destinés à la vente. Ceux qui aimeraient fumer plus de poissons et ceux qui aimeraient en consommer davantage ont donc différents plans en tête à bord de la pirogue pour arriver à leurs fins. Toutefois, au bout du compte, personne ne se retient de manger du poisson (Photo4).

http://jambo.africa.kyoto-u.ac.jp/cgi-bin/CameroonFS_en/wiki.cgi?action=ATTACH&page=Why+the+Family+Fishes+Together&file=Sharing+food+at+camp%2EJPG
Photo 4: Le partage de la nourriture entre les membres d’un grand groupe après le camp de pêche est une tâche difficile

On a constaté récemment un accroissement du nombre de pêcheurs venant du nord du Cameroun et de l’Afrique de l’Ouest dans les fleuves et rivières des forêts tropicales humides. De nombreux Bakwele n’ont pas les moyens d’acheter de nouveaux hameçons et de nouveaux filets ; alors ils s’endettent pour s’offrir leurs nouveaux équipements de pêches. Alors qu’ils n’accordent que peu d’attention aux pêcheurs venant du nord du Cameroun et de l’Afrique de l’Ouest qui apportent des milliers d’hameçons de fabrication nigériane et plusieurs centaines de mètres de filets maillants, les hommes Bakwele perpétuent la pêche en famille en soutenant les pratiques de pêche qui tiennent compte de l’importance de la communication lors du camp de pêche.

Pour de plus amples informations sur les activités de pêche du peuple Bakwele des forêts tropicales humides du Cameroun, veuillez consulter l’extrait vidéo suivant et les références ci-après.

  • Vidéo prise par Oishi, T., « Comment écoper l’eau à la pêche à l’écope (dans le courant d’un étang) » lien1 lien2
  • Oishi, T. in press. Sharing hunger and sharing food: Staple food procurement in long-term fishing expeditions of Bakwele horticulturalists in southeastern Cameroon. African Study Monographs, Supplimentary Issue 47.
  • Oishi, T. 2010. « Séjour en forêt: Cas des pratiques de pêche parmi les cultivateurs Bakwele dans les forêts tropicales du sud-est du Cameroun » (en japonais). Dans (D. Kimura & K. Kitanishi, eds.) Morisumi-no-shakaishi -- Peuple, Nature et Histoire des Forêts Tropicales Africaines 1: Des Perspectives Sociales, pp. 97-128. Presse de l’Université de Kyoto, Kyoto.